Près de 30% des Français auraient un foie trop gras, c'est-à-dire qu’ils sont atteints de stéatose hépatique non alcoolique, aussi appelée “maladie du foie gras”.
Méconnue alors qu’elle en inquiétante progression, elle est “sortie du placard” lorsqu’en mars 2017, le journaliste sportif, Pierre Ménès révélait avoir été atteint d'une cirrhose liée à cette affection.
Véritable maladie de la malbouffe, cette pathologie peut, en effet, dégénérer en cirrhose faute de prise en charge.
Pourtant, des changements de mode de vie simples permettent de contrôler son risque de progression de manière durable et efficace.
Qu’est-ce que la "maladie du foie gras" ou stéatose hépatique non alcoolique ?
Afin de mieux comprendre la stéatose non alcoolique, penchons-nous d’abord sur le rôle du foie.
Comprendre le fonctionnement du foie
Le foie est un organe pèse en moyenne 1.5 kg. Il est situé dans la partie supérieure droite de l’abdomen, protégé par les dernières côtes.
Il assure près de 600 fonctions dans le corps.
Les principales sont :
- La production : Il joue un rôle central dans le contrôle de la concentration du sucre dans le sang et est essentiel à la production de la bile, de protéines, de graisses ainsi que de certaines hormones.
- La détoxification : il sert de filtre à toutes les molécules qui traversent l’organisme (médicaments, alcool, alimentation, …)
- Le traitement des graisses : Il assure le rôle de « centrale de traitement » des graisses consommées : production, transformation, transport. Le foie n’a pas pour vocation de stocker les graisses, toutefois lorsqu’il est sain, certaines de ses cellules (maximum. 5%) en contiennent quelques « gouttes ».
Le foie est un organe crucial qui est au centre de processus métaboliques essentiels. Et, par son implication dans le traitement des graisses, il joue même un rôle primordial dans le bon fonctionnement du système cardio-vasculaire.
Qu’est-ce que la stéatose hépatique non alcoolique ?
La stéatose hépatique non alcoolique se définit comme une surcharge graisseuse du foie, sans rapport avec la prise d’alcool.
De manière naturelle, le sucre est transformé en graisses par le foie pour être stocké en réserve en cas de besoin. Mais, lorsque l’apport en sucres et en graisses est trop important, le foie produit et stocke de la graisse en excès.
Lorsque le pourcentage de cellules graisseuses présentes dans le foie dépasse les 5%, on dit qu’il y a une « stéatose » (ce terme signifie « augmentation de la graisse »).
À ce stade, le foie est en général plus gros que la moyenne, et apparaît blanc à l’échographie (on dit qu’il est « brillant »). Chez certaines personnes, cette augmentation de graisse restera bénigne. Mais, chez d’autres, faute de prise en charge adaptée, elle pourra dégénérer. C’est à ce stade précoce qu’il faut agir.
Comprendre la maladie du foie gras
Les causes
La maladie du foie gras est conséquence d’un mode de vie trop sédentaire, associé à un régime alimentaire trop riche en graisses et en sucres.
On dit souvent qu’elle est civilisationnelle, car elle est intimement liée à la manière dont nous vivons aujourd'hui : manque d’exercice, malbouffe, consommation de sucres raffinés en excès...
Il est important de noter que cette maladie, contrairement à de nombreuses affections du foie, n’est pas causée par une consommation trop importante d’alcool.
Les facteurs de risque
Certaines personnes sont plus exposées que d’autres à la maladie du foie gras.
En effet, certaines affections sont reconnues comme facteurs de risque, et tout particulièrement :
- Le surpoids et l’obésité, c'est-à-dire un indice de masse corporelle supérieur (IMC) à 25 ou à 30.
- Le prédiabète et le diabète qui sont des troubles d’assimilation, d’utilisation et de stockage des sucres provoquant une hyperglycémie.
- Le syndrome métabolique qui est l’association de plusieurs troubles physiologiques et biochimiques, indiquant un désordre dans le métabolisme. On dit d’une personne qu’elle présente un syndrome métabolique lorsqu’elle cumule plusieurs des affections suivantes :
- Obésité abdominale (c'est-à-dire un tour de taille supérieur à 94 cm chez les hommes et 80 chez les femmes)
- Prédiabète ou diabète de type 2
- Hypertension artérielle
- Taux élevé de triglycérides (qui sont des molécules lipidiques)
- Faible taux de cholestérol HDL
Les conséquences
La maladie du foie gras est ce que l’on appelle une maladie progressive. Sans prise en charge, elle peut évoluer vers des pathologies plus lourdes, et ce, par étapes.
- La NASH. À ce stade, la graisse accumulée dans le foie devient toxique et provoque des lésions. Le corps développe alors un mécanisme de défense appelé « inflammation ». Les cellules souffrent et gonflent.
- La cirrhose : Si rien n’est fait pour stopper la progression de la maladie, alors le foie entame un processus de cicatrisation des lésions. Un tissu, comme une cicatrice, apparaît sur le foie : c’est la « fibrose ». Ce tissu cicatriciel ne fonctionne pas aussi bien que le tissu sain, et peu à peu, le foie perd ses fonctions. La fibrose est classée en 4 stades de sévérité. Aux stades 1 à 3 (légère, modérée, avancée), l’évolution de la fibrose peut encore être ralentie, voire stoppée. Au stade 4, cette fibrose s’étend à l’ensemble du foie. On parle alors de cirrhose. Celle-ci devient peu à peu irréversible.
- Le cancer du foie. À la suite du stade 4, le foie continue de se dégrader, et ce, jusqu’à l’insuffisance hépatique. La cirrhose peut alors dégénérer en cancer du foie.
À noter : chez personnes atteintes de la NASH, un cancer du foie peut se développer sans forcément passer par la “case” cirrhose.
En outre, et dans la mesure où le foie est au centre de multiples processus métaboliques, l’inflammation chronique créée par la maladie a des effets néfastes sur le bon fonctionnement cardio-vasculaire. Ainsi, le premier danger pour les malades est d’ordre cardio-vasculaire : survenue d’une maladie ou d’un accident (infarctus, AVC…)
Enfin, la maladie du foie gras augmente également le risque de développer un diabète ou d’aggraver un diabète déjà existant.
Les symptômes
Le foie étant un organe plutôt discret, la maladie du foie gras est une maladie silencieuse. Généralement, les patients ne ressentent aucun symptôme et elle est découverte fortuitement lors d’examens.
Quelques indices peuvent toutefois mettre la puce à l’oreille :
- douleur modérée
- inconfort dans la partie supérieure droite de l’abdomen
- fatigue
Ce n’est qu’à un stade plus avancé que les premiers symptômes apparaissent, mais ils sont peu spécifiques et peuvent être liés à d’autres affections :
- Perte d’appétit
- Gonflement des jambes
- Confusion et troubles de l’élocution
- Coloration jaune des yeux ou de la peau
- Hémorragies digestives
- Accumulation de liquide dans l’abdomen.
Stéatose hépatique non alcoolique, que faire ?
Face à une maladie du foie gras, il est urgent de changer son mode de vie afin de limiter la progression de la maladie.
Il n’existe, à ce jour, pas de traitement médicamenteux, mais il est possible d’agir durablement et efficacement en suivant des recommandations simples.
C’est un effort essentiel qui passe par une perte de poids, l’adoption d’une alimentation adaptée, de l’exercice physique ainsi que par l’aide de compléments alimentaires adaptés.
Le rôle de l’alimentation
La maladie du foie gras étant une maladie de la nutrition, il est essentiel d’agir au niveau alimentaire. On retrouvera les grandes lignes des conseils donnés face à un diabète de type 2 ou à un syndrome métabolique :
- Adoptez une alimentation faible en calories, mais néanmoins équilibrée qui vous permettra de perdre du poids durablement et de contrôler l’insulinorésistance.
- Privilégiez les aliments à faible densité calorique comme les fruits et les légumes, qui de plus apportent des fibres et des anti-oxydants.
- Limitez votre consommation de glucides. La baisse des calories doit se faire essentiellement sur les glucides, plutôt que sur les lipides.
- Évitez les sucres simples (confiseries, pâtisseries,...) à l’exception de ceux présents dans les fruits. Ne sucrez pas vos yaourts, fruits ou boissons chaudes. Soyez vigilants aux étiquetages alimentaires. De nombreux produits industriels, comme les céréales du petit-déjeuner, contiennent du sucre ajouté en quantité souvent importante.
- Choisissez des aliments à index glycémique (IG) bas : céréales complètes et semi-complètes, légumes secs ; patates douces… Soyez attentifs au mode de cuisson : des pâtes al dente auront un index glycémique moindre que des pâtes bien cuites. Fuyez les féculents à cuisson rapides et les faux amis, comme les galettes de riz.
- Consommez des acides gras mono-insaturés, en particulier des oméga-3 (poisson gras et semi-gras, huile de colza et de lins, oléagineux…).
- Réservez l’alcool aux occasions festives et fuyez les sodas et autres boissons sucrées. Veillez à boire 1,5 à 2 litres d’eau par jour.
L’activité physique
L’activité physique permet un meilleur contrôle du poids, ainsi que de la glycémie pour les diabétiques et réduit le risque cardiovasculaire. Elle est également un soutien émotionnel majeur dès lors que l’on entame un changement de ses habitudes alimentaires, souvent générateur de stress.
Soyez actif autant que possible. Marchez, jardinez, pratiquez des activités physiques modérées (natation, course lente, yoga) et, si votre condition vous le permet, plus intenses (tennis, cyclisme, course rapide…)
Faites-vous plaisir et allez vers des activités qui vous conviennent tout en restant prudent. En cas de reprise du sport, parlez-en à votre médecin afin qu’il vous accompagne pour entamer sereinement et sans risque cette transition.
Les compléments alimentaires
Réguler les organes et combler des carences peut aider à limiter la progression de la maladie du foie gras et à éviter qu’elle ne dégénère en pathologies plus lourdes.
L'artichaut
Consommé sous la forme de suspension de plantes fraîches (SIPF), l’artichaut :
- Soutient l'activité le foie grâce à ses vertus dépuratives mais, aussi cholérétiques, c’est-à -dire qu’il stimule la sécrétion de bile.
- Assure un rôle protecteur du foie(1)
- Aide à prévenir le cancer du foie. Les polyphénols qu’il contient permettraient, en effet, de provoquer l'apoptose (c’est-à-dire la mort programmée) des cellules cancéreuses du foie(2)
- Aide à diminuer la glycémie. L’extrait de feuilles aurait un effet hypoglycémiant : des études ont montré que la glycémie de personnes atteintes de diabète de type 2 aurait fortement baissé grâce à l’utilisation de cet extrait(1).
La vitamine E
Il a été montré que les personnes souffrant d’un syndrome métabolique, souvent associé à la stéatose hépatique non alcoolique, ont un besoin accru de vitamine E, de 30 à 50% supérieur à des personnes en bonne santé(3).
En outre, des études ont pu mettre en évidence que celle-ci contribue à réduire les inflammations mais aussi la fibrose chez les sujets atteints de la maladie du foie gras(4). Cette piste intéressante est corroborée par une autre étude qui a révélé que la vitamine E tend à protéger le foie chez les personnes souffrant de stéatose hépatique non alcoolique(5).
Le zinc et le picolinate de cuivre
Le zinc régule la glycémie en stimulant la synthèse de l’insuline. Il a, par ailleurs, été montré qu’en association avec du magnésium, fait baisser la pression artérielle, souvent élevée chez les personnes atteintes d’un syndrome métabolique(6).
Quant au picolinate de cuivre, il joue également sur le contrôle de la glycémie, permet une meilleure assimilation des sucres et aide à réduire le taux de cholestérol et de triglycérides. Il contribue à diminuer la masse graisseuse et à accroître la masse musculaire(7).
Les oméga-3
Les oméga-3 aident à diminuer la stéatose du foie(8). Si la consommation d’huile de colza et de lin permet de couvrir généralement les apports recommandés en acide alpha-linolénique, il est rare que les besoins en oméga-3 à longue chaîne, EPA et DHA soient comblés par l’alimentation, d’autant qu’un taux élevé de triglycérides tend à augmenter ces besoins.
Une supplémentation en oméga-3 s’avère ainsi souvent nécessaire afin d’atteindre les 1 à 3 gr quotidiens recommandés.
Des probiotiques
On sait aujourd’hui que le microbiote intestinal joue un rôle très important dans le fonctionnement de notre organisme, particulièrement au niveau métabolique (métabolisme énergétique, sensibilité à l’insuline et traitement des glucides, métabolisme des acides biliaires...)(9).
En outre, les déséquilibre du microbiote induisent de l’inflammation de bas grade et peuvent conduire à l’insulinorésistance.
Des études ont pu mettre en évidence qu’une supplémentation en probiotiques permet, en rétablissant l’équilibre du microbiote, de réduire la stéatose et de lutter contre l’inflammation(10).
Afin de rétablir l’équilibre de la flore intestinale, vous commencerez par associer pendant au moins un mois de la L-Glutamine, un acide aminé qui contribue à renforcer l’intégrité de la muqueuse intestinale (11) et diminue l’inflammation avec des probiotiques. Puis vous ferez régulièrement des cures d’entretien de 20 à jours.
La maladie du foie gras, d’abord silencieuse mais, conjuguée à des facteurs de risques bien visibles, nécessite une véritable prise en main de la part du malade lui-même. Même si des compléments alimentaires peuvent l’aider à limiter l’extension de la maladie, de véritables modifications du mode de vie sont essentielles.
Sources:(1) Maryem Ben Salem& Hanen Affes & Kamilia Ksouda & Raouia Dhouibi & Zouheir Sahnoun & Serria Hammami & Khaled Mounir Zeghal. Pharmacological Studies of Artichoke Leaf Extract and Their Health Benefits. Plant Foods Hum Nutr (2015) 70:441–453 DOI 10.1007/s11130-015-0503-8(2)Miccadei S, Di Venere D, Cardinali A, Romano F, Durazzo A, Foddai MS, Fraioli R, Mobarhan S, Maiani G. Antioxidative and apoptotic properties of polyphenolic extracts from edible part of artichoke (Cynara scolymus L.) on cultured rat hepatocytes and on human hepatoma cells. Nutr Cancer. 2008;60(2):276-83(3)Maret G Traber, Eunice Mah, Scott W Leonard, Gerd Bobe, Richard S Bruno. Metabolic syndrome increases dietary α-tocopherol requirements as assessed using urinary and plasma vitamin E catabolites: a double-blind, crossover clinical trial. The American Journal of Clinical Nutrition, 2017; ajcn138495 DOI: 10.3945/ajcn.116.138495(4)K Sato et al. Vitamin E has a beneficial effect on nonalcoholic fatty liver disease: A meta-analysis of randomized controlled trials. Nutr J 2015; Jul–Aug Vol31:923–30.(5)Magosso E, Ansari MA, Gopalan Y, Shuaib IL, Wong JW, Khan NA, Abu Bakar MR, Ng BH, Yuen KH. Tocotrienols for normalisation of hepatic echogenic response in nonalcoholic fatty liver: a randomised placebo-controlled clinical trial. Nutr J 2013 Dec 27;12(1):166.(6)Diabetes Care, octobre 2005, vol. 28, n° 10, p. 2.458-2.464(7)Martin, J., Wang, Z. Q., Zhang, X. H., Wachtel, D., Volaufova, J., Matthews, D. E., & Cefalu, W. T. (2006). Chromium picolinate supplementation attenuates body weight gain and increases insulin sensitivity in subjects with type 2 diabetes. Diabetes care, 29(8), 1826-1832.(8)Parker HM, Johnson NA, Burdon CA, Cohn JS, O’Connor HT, George J. Omega-3 supplementation and non-alcoholic fatty liver disease: a systematic review and meta-analysis. J Hepatol 2012 Apr;56(4):944-51.(9)He X, Ji G, Jia W, Li H. Gut Microbiota and Nonalcoholic Fatty Liver Disease: Insights on Mechanism and Application of Metabolomics. Int J Mol Sci 2016 Mar 15;17(3).(10)Tian Y, Wang H, Yuan F, Li N, Huang Q, He L, Wang L, Liu Z. Perilla Oil Has Similar Protective Effects of Fish Oil on High-Fat Diet-Induced Nonalcoholic Fatty Liver Disease and Gut Dysbiosis. Biomed Res Int. 2016;2016:9462571(11)Ilan, Y. (2012). Leaky gut and the liver: a role for bacterial translocation in nonalcoholic steatohepatitis. World journal of gastroenterology: WJG, 18(21), 2609.(12)